Recherche 51 e escadre désespérément

La 51e escadre a été créée en avril 1937. Il n’y avait pas d’escadre à Tours avant 1934. L’arrivée de deux escadrilles de Mayence en 1930 a donné naissance à une double confusion.

En 1930, les Breguet 19 de l’ex-groupe de Mayence (GR 1) et les Potez 25 du GO 5 partent s’entraîner au tir à Cazaux. Le rapprochement des deux groupes de reconnaissance va donner naissance aux deux légendes.
(@ Didier Lecoq)

Une cérémonie a eu lieu à Tours, le 20 juin 1930, pour l’arrivée de deux escadrilles du 33e régiment de Mayence contraint de quitter la Rhénanie que les forces françaises d’occupation évacuent. Elle a donné naissance à deux légendes :

  • le Breguet 19 présenté comme l’avion d’armes du 31e régiment alors qu’il n’équipait que deux des huit escadrilles de Tours pendant trois ans seulement.
  • la création de la 51e escadre qui serait née du rapprochement des deux groupes de reconnaissance, le 5e issu du 31e RAO (Spa-bi 42 et Sal 39) et le 1er de Mayence (Sal 19 et Br 104).

Furtive avant l’heure, cette 51e escadre n’a vraiment existé qu’en 1937. A Tours, nous n’en avons pas trouvé la moindre trace. D’où cette conclusion. La 51e escadre, version 1930, n’a pas existé.

Sur quelles informations peut-on s’appuyer pour dire qu’il n’y avait pas de 51e escadre à Tours en 1932-1933 ?

Dans les journaux d’Indre-et-Loire

Là, rien. Pas le moindre accident d’avion de cette 51e escadre à annoncer ? Bravo, cela aurait mérité un article. Aucune affectation à cette 51e escadre, aucune promotion, aucune décoration pour un de ses membres ; pas de remise de drapeau, pas de réception, pas d’inspection, pas de chef.

Ses aviateurs auraient ainsi été d’une étonnante discrétion. Aucun n’a participé, même de façon infime, à la vie tourangelle : pas de représentants de la 51e au Bal des ailes, à la vie des aéro-clubs, aux revues militaires…

Les hommes

Commençons par les carnets de vol. Si on restreint à la période d’août 1933 à août 1934, on devrait retrouver trace dans les carnets de vol. Un exemple suffira avec ceux de Pierre Scavizzi, parfaitement tenus.

Pierre Scavizzi était alors à la 15e escadrille, la Spa 42, sur Potez 25. Cette escadrille aurait dû appartenir à la 51e escadre… si elle avait existé.

En janvier 1933, l’unité est bien l’escadrille 15. (© Famille Scavizzi via Vincent Lemaire)

Son carnet de vol, en janvier 1933, mentionne bien l’appartenance à l’escadrille 15, commandée par le capitaine Chrétien, feuillet paraphé par le commandant Founier, qui dirige le GO5, et le colonel commandant le 31e régiment. Pas de 51e escadre.

Autre type de document, cela concerne justement le capitaine Henri Chrétien, extrait de son dossier personnel d’officier qui se trouve à Vincennes.

Les temps de commandent du capitaine Chrétien. (Source SHD Vincennes)

Henri Chrétien a été commandant de l’escadrille 15/31 du 25 décembre 1929 au 31 décembre 1933. Puis commandant de l’escadrille 5/31 du 1er janvier au 30 novembre 1934. Cette escadrille n’a pas changé d’appartenance, de 1929 à 1934. Là encore, pas de trace de 51e escadre. Le changement de numéro (de la 15e à la 5e escadrille) s’est opéré lors de la création des escadres à Tours et la création de la base aérienne 131 en 1934.

Le groupe de reconnaissance 1/31

Mais il y a mieux. Une unité a toujours un commandant, n’est-ce pas ? Pour la 51e escadre, chou blanc. En revanche, les journaux ont parlé d’au moins deux commandants du GR 1: Wisen, qui l’a ramené de Mayence à Tours, puis Hubert de Geffrier qui est resté le plus longtemps.

Dans les états de service du futur général de Geffrier figure d’ailleurs une lettre de félicitations du général commandant la 3e région aérienne. Elle commence ainsi : « Une escadrille mixte du groupe de reconnaissance I/31 sous le commandement du chef de bataillon de Geffrier vient d’accomplir un voyage de 2.135 km en 17 heures de vol effectif »…

En janvier 1933, comme chaque année, les journaux publient les mutations les plus importantes. Il en est ainsi pour le commandant de Geffrier qui est affecté au Centre d’études aéronautiques. Il est bien présenté comme « chef de bataillon breveté du 31e rég. d’aviation ». 31e régiment, pas 51e escadre…

Le groupe ex-Mayence reçoit d’ailleurs le prix des Amis du 31e régiment pour la période 1932-1933.

Un Breguet 19 de la Sal 19 (1re escadrille du GR 1/31). Cette escadrille apporte
au 31e régiment sa première et unique victoire dans la Coupe Breguet. (@ Didier Lecoq)
Pourquoi ce n’était pas possible

En 1932, l’aéronautique a décidé de modifier son organisation. Jusque-là, les terrains comme Tours, étaient administrés par un (ou plusieurs) régiment(s) d’aviation qui commandait les infrastructures et toutes les unités sont les escadrilles.

La réforme annoncée pour 1932 redistribuait les cartes:

  • le terrain devenait une base aérienne
  • les escadrilles étaient regroupées au sein d’une escadre (deux à Tours).

D’autres échelons étaient d’ailleurs créés, avec la demi-brigade qui chapeautait la base et les escadres aériennes.

Un plan ambitieux. Trop. Il va se limiter à quelques bases aériennes qui serviront d’expérimentation. Tours attendra.

Ce n’est que le 1er janvier 1934 que Tours fait sa mue, en même temps que de nombreux sites. Ce jour-là, le 31e régiment devient 31e escadre et le 2e régiment de chasse devient 2e escadre.

Il ne pouvait pas y avoir un régiment et une escadre en même temps à Tours. Ni ailleurs.

Le camp d’aviation devient base aérienne 131 ce 1er janvier 1934 (DM 1997 du 5 décembre 1933 ) puis base aérienne 109 (1er juillet 1936) et base aérienne de Tours le 15 octobre 1936 (DM 2316 du 22 octobre 1936).

Quant à la 51e escadre, il a fallu attendre l’arrivée d’un groupe de Dijon pour que la 31e escadre soit ramenée à quatre escadrilles, les deux autres (Spa bi-42 et Sal 39) fusionnant avec le nouveau groupe pour former une nouvelle escadre avec deux groupes et quatre escadrilles. La 51e escadre.

Didier Lecoq

A propos Didier Lecoq 90 Articles
Journaliste à la retraite. Président d'honneur de la section Centre des journalistes sportifs. Secrétaire général de la rédaction à la Nouvelle République, à Tours, jusqu'en 2020. Sage conseiller à Amboise.

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